Rapport annuel 2015 de l'observatoire des délais de paiement : synthèse
Dans la rubrique Actualité du crédit
Après un an d’interruption, l’observatoire des délais de paiement a repris ses travaux d’examen fin 2015 et a remis lundi son rapport sur les comportements de paiement des entreprises. Cette étude exhaustive, menée conjointement par différents professionnels du risque client (dont Altares), l’INSEE, la Banque de France et la DGCCRF entre autre est fondamentale pour apprécier les risques de défaillances des entreprises. Notre synthèse sur cette tendance
Les délais de paiement poursuivent leur mouvement historique de baisse et atteignent leur point le plus bas depuis 15 ans. Ce repli, entamé au début des années deux mille, s’est confirmé avec l’entrée en vigueur de la loi de modernisation de l’économie (LME) qui instaure un dispositif d’encadrement légal des délais de paiement. La baisse s’est ainsi accentuée dès 2008, malgré le retournement du contexte économique. Entre 2000 et 2014, les entreprises sont réglées plus rapidement, avec un délai clients en 2014 plus court de 11 jours de chiffre d’affaires, comparé à 2000.
Cette baisse continue des délais de paiement est à relativiser puisque le paiement des fournisseurs diminue plus rapidement que les encaissements clients, provoquant finalement une dégradation du solde crédit interentreprise de 2 jours de CA entre 2000 et 2014.
Les retards de règlement (différence entre le délai contractuel et le paiement effectif) est en hausse rapide et continue depuis le printemps 2014, atteignant au début de l’été 2015 leur pire valeur depuis dix ans, à 13,6 jours, se stabilisant à 13,2 jours fin 2015.
La situation semble s’être plus particulièrement dégradée de la mi-2014 à la mi-2015, avec notamment l’augmentation du nombre des « petits retards ».
La construction
Ce secteur se heurte à des difficultés structurelles, accentuées par la crise, du fait des règlements fournisseurs encadrés par la LME (diminution du délai légal de paiement), alors que les règlements clients ne relèvent pas de cette loi (notamment du fait de règlements à partir des états de situation ou des décomptes mensuels de travaux).
En 15 ans, le solde commercial du secteur s’est alourdi de 6 jours de chiffre d’affaires, dont 5 jours depuis l’entrée en vigueur de la LME. Cette aggravation des besoins de trésorerie témoigne des difficultés, récurrentes et aggravées par la crise, auxquelles sont confrontées les entreprises du secteur dans le recouvrement de leurs créances. C’est notamment le cas des plus petites qui subissent un rapport de force défavorable face aux grands donneurs d’ordre, tant privés que publics.
L’industrie et le transport
Concernant l’industrie, le besoin de trésorerie des entreprises s’est allégé de 4 jours de chiffre d’affaires depuis la mise en œuvre de la LME, qui a accéléré la tendance baissière amorcée quelques années plus tôt.
Le transport quant à lui continue de subir un important décalage de trésorerie de 28 jours de chiffre d’affaires et un BFR structurellement élevé (paiement des charges au comptant et des encaissements différés). Comparé aux autres secteurs, le transport connaît néanmoins la plus forte baisse du solde commercial sur 15 ans (– 8 jours) à la faveur d’une diminution de 17 jours des délais clients. Ces évolutions sont toutefois à nuancer, car une partie du secteur fait l’objet d’une réglementation spécifique fixant à 30 jours la date limite de règlement (loi n° 2006‑10 du 5 janvier 2006 et article 441‑6 du Code de commerce). À 54 jours de chiffre d’affaires, les délais clients moyens de l’ensemble du secteur demeurent relativement élevés.
Les activité de soutien et l’information-communication
Les entreprises des deux secteurs sont les plus grosses contributrices au solde du crédit interentreprises respectivement à 48 et 42 jours de chiffre d’affaires. Ce sont souvent de petites structures susceptibles de subir un rapport de force défavorable de la part de leurs clients.
Le commerce et l’hébergement-restauration
Avec une clientèle largement constituée de ménages payant au comptant, le décalage entre les encaissements et les décaissements représente une ressource financière pour les entreprises du secteur, estimée comme en 2013, à 7 jours de chiffre d’affaires.
Par taille d’entreprise
En 2014, les grandes entreprises sont les seules à bénéficier d’un allégement de leur solde commercial alors qu’il est stable pour les autres catégories d’entreprises.
Les délais de paiement des fournisseurs sont en baisse pour les petites et moyennes entreprises (PME), en hausse pour les grandes entreprises et stables pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Paradoxalement, ce sont donc les PME, structurellement plus fragiles que les grandes entreprises, qui restent les plus vertueuses en terme de paiement !
Plus d’une grande entreprise sur deux règle ses fournisseurs avec retard, contre une PME sur trois (seulement). De même les « grands retards », supérieurs à 2 mois, sont proportionnellement deux fois plus nombreux chez les grandes entreprises que chez les PME.
Au final, la réduction des délais de paiement manque l’un de ses objectifs qui était d’alléger la contribution des PME au solde du crédit interentreprises.
La trésorerie qui serait libérée dans l’hypothèse d’un strict respect de la loi est estimée à 12 milliards, 16 milliards pour les PME (+ 1 milliard par rapport à 2013) et 4 milliards pour les ETI (comme en 2013).
http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/observatoire_delais_paiement_rapport_annuel_2015.pdf
Philippe Bernis (Direct Recouvrement)
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