L’évaluation du risque client et son actualisation
Dans la rubrique Se faire payer : les bonnes pratiques
Parmi les instruments de gestion des risques, traiter l’évaluation du risque client, et de toute la gestion contractuelle en amont, est fondamental pour les chances futures de recouvrement.
La question à se poser :
« Est-ce qu’on subit l’ouverture de compte ou bien est ce qu’on la maîtrise ? »
Une politique de prévention ne peut être mise en place sans une réelle circulation de l’information entre services commerciaux, financiers et techniques. La remontée d’informations terrain émanant principalement des services commerciaux est un élément essentiel de l’évaluation du risque client.
Il est évident que certaines entreprises, compte tenu de l’étroitesse de leur marché, ont peu de clients, et peu de clients potentiels, qu’ils connaissent déjà, et dans ce cas le choix du client n’est pas un véritable choix. Même dans ce cas la démarche d’évaluation du risque ne peut cependant être écartée, car on peut avoir par exemple un contrat avec un groupe solide, qui est finalement confié à un maillon faible du groupe, c'est-à-dire une filiale insolvable. Dans d’autres cas le client interpose un intermédiaire moins fiable.
La stratégie d’ouverture de compte client
On doit résoudre la tension entre le commercial et le risque financier !
Le « financier pur » aura tendance à ne jamais accepter un client à risque trop élevé tandis que le « commercial pur » voudra prendre toutes les commandes car on en a besoin. La bonne démarche consiste à apprécier le risque et motiver l’acceptation ou le refus du client.
Le choix n’est pas nécessairement binaire. Il ne s’agit pas de répondre par oui ou non, mais souvent par « oui mais » : on peut accepter un client à risque mais en sécurisant la relation par des clauses contractuelles et des garanties financières (acompte, réserve de propriété, garantie bancaire, etc).
« Ne pas subir l’ouverture de compte »
Cette nécessaire flexibilité ne doit pas seulement concerner l’ouverture de compte, mais aussi la procédure de recouvrement, à adapter en fonction de la situation, spécialement en précontentieux : client régulier ou non, vente ou location, etc. (en location financière il y a une gestion administrative élevée, mais aussi une marge élevée).
La question du « timing » est primordiale.
« S’interroger sur l’acceptation du client avant de prendre la commande ! »
Le commercial doit nécessairement s’interroger sur l’acceptation du client avant qu’il ait pris la commande ! A défaut, il sera encore possible de bloquer le processus avant d’avoir fait l’accusé de réception de la commande.
Certaines entreprises pénalisent leurs commerciaux ou réduisent leur commission ; cela sur 3 critères :
‐ Chiffre d’affaires
‐ marge dégagée,
‐ dépassement d’un taux d’impayé
Exemple : le taux d’impayé est 0,3%, ou moyenne France tous clients : au-delà, une partie de la commission tombe.
Il faut pouvoir suivre ces données, bien sûr, il faut que le commercial ait accès à l’information.
L’estimation des risques / rating
Le Credit Manager, quand il y en a un, fait des procédures de rating et les revoit régulièrement. Le juriste peut souvent aller plus loin. Le juriste a un rôle majeur à jouer sur les conditions contractuelles avec le client ; ce sujet n’est pas celui de l’ouverture du compte, mais cela joue un rôle.
Définir la stratégie ne consiste pas forcément à choisir des clients sans risque. La stratégie peut être agressive et risquée :
‐ si on veut prendre de nouveaux marchés
‐ si la marge est importante,
le risque peut en valoir la peine.
On peut globaliser ce risque sur tous les clients et faire une évaluation du risque. L’ouverture doit être faite sur les mêmes documents et informations de base pour tous les clients.
« Ce client a toujours bien payé …» :
Il faut se méfier du « vieux client » qui a toujours bien payé, car cela peut changer, lors d’un renouvellement des dirigeants par exemple. Il faut penser à actualiser l’information.
La prise de garanties ou d’une assurance-crédit ne doit pas dispenser d’estimer le risque réel du client, car ces garanties ne tiennent généralement plus lorsque le client est insolvable. Elles ont un coût à mettre en regard des avantages.
« Une garantie ne dissipe pas le risque client »
De nombreuses factures de ventes sont faites dans l’urgence : on dépanne le client, on va vite, et on prend un risque d’impayé et de coût de relance.
Les délais de règlement dans la décision d'ouverture d'un compte sont à prendre en compte. Les clients publics ou parapublics (EDF, SNCF, etc.) peuvent générer des délais de paiement très longs. Cela a une influence sur les clients privés proprement dits, encore plus difficiles à gérer.
Ouverture de compte pour une PME : quand on a des commandes isolées et élevées - il peut y avoir 5 ans entre chaque commande. Peu de clients, peu de factures, donc risque très fort, affaires s’étalant sur 18 à 30 mois, certaines font 40% du CA. Dans ce cas on ne refuse pas le client, l’ouverture de compte est purement administrative et fondée sur la note Banque de France.
Une ouverture de compte en « oui mais » : parmi les conditions fixées, exiger des acomptes.
Définir une limite d’encours de crédit ?
Opposer une telle limite au client peut soulever des difficultés d’ordre juridique et d’ordre commercial. Le but est de rendre contractuelle cette limite. Cette limite est définie par le responsable client, avec le commercial ou le responsable commercial. Inclure l’effet tunnel (1 jour banque).
En cas d’assurance-crédit, il est facile de faire passer un encours client car ce niveau dépend de l’assureur-crédit. L’inconvénient est qu’alors le Credit Manager perd la capacité de décision.
Philippe Bernis (Direct Recouvrement)
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