La clause de réserve de propriété
Dans la rubrique La réglementation en vigueur
Qu’est-ce que la réserve de propriété et dans quelles situations s’applique-t-elle ?
La réserve de propriété est reconnue en France depuis une loi de 1980, modifiée plusieurs fois et enfin codifiée dans le Code de commerce (articles L624-16 et suivants).
La réserve de propriété est, en quelque sorte, une garantie de paiement puisqu’elle consiste pour le fournisseur à conserver la propriété du produit tant qu’il n’en a pas été payé intégralement.
Son objet est de permettre la récupération des produits livrés voire de faire opposition au paiement par le client du client – ou bien de faire pression sur le client pour qu’il paie.
Elle est mise en œuvre essentiellement dans le cas où le client fait l’objet d’une procédure collective - dite « dépôt de bilan » du client : sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire (régime défini par le Code de commerce).
La réserve de propriété est-elle limitée aux contrats de vente ?
Non, elle est possible pour toute affaire dont le but comporte le transfert de la propriété d’un produit. Elle concerne donc diverses formes de contrats et plus spécialement :
‐ la vente : livraison d’un produit catalogue, standard ou faiblement adapté ;
‐ le contrat d’entreprise : fabrication sur demande et sur spécifications, sous-traitance, prestation de service ou maintenance comportant la fourniture de pièces.
Le principe légal est celui du transfert de la propriété dès la vente.
Autrement dit, sous la loi française, la propriété passe immédiatement au client, dès que la vente est conclue ! Si le fournisseur souhaite demeurer propriétaire jusqu’à une date ultérieure, il est nécessaire qu’une clause de réserve de propriété soit convenue.
« Pas de réserve de propriété sans clause »
La clause de réserve de propriété est … une clause ! Elle doit être convenue. Elle n’est pas de droit, mais doit au contraire avoir été « convenue » dans un écrit remis au plus tard lors de la livraison.
Les tribunaux exigent que la clause figure de manière apparente. L’idéal est que le client la signe, ce qui est rare. Il peut l’avoir acceptée tacitement, puisqu’ayant reçu les documents, passé commande et réceptionné le produit sans la contester.
Les conditions générales peuvent contenir cette clause, cela est recommandé, mais ne suffira pas en général (dans les CGV, il est conseillé de mettre la clause en évidence – en gras, encadré etc).
Il est donc recommandé de faire figurer cette clause distinctement, de manière apparente et lisible :
‐ sur l’offre
‐ sur l’accusé de réception de commande - document fortement recommandé
‐ etc.
Que faire en cas de redressement, sauvegarde ou liquidation du client ?
En cas de « procédure collective » (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire), les conditions et les modalités de mise en œuvre est réglée par le Code de commerce.
Les produits livrés ne peuvent pas être récupérées manu militari sans formalité !
La première démarche : demande à l’administrateur judiciaire
Il faut demander l’autorisation :
‐ en principe à l’Administrateur judiciaire,
‐ ou, dans le cas particulier où il n’y a pas d’administrateur judiciaire, au « débiteur » c'est-à-dire au chef d’entreprise.
Une copie de la demande est adressée au mandataire judiciaire.
En pratique, on lui adresse par L.R/A.R, dans les 30 jours de la publication officielle du jugement. Le juge n'est saisi qu'en cas de refus à l’issue de la période de 30 jours (le juge est obligé de statuer dans une période raisonnable).
L’administrateur judiciaire peut :
‐ accepter : alors il ne reste plus qu’à aller récupérer la marchandise ;
‐ garder le bien, mais régler les sommes restantes dues. Dans ce cas la créance bénéficie alors d'une priorité de paiement, étant assimilée à une créance postérieure à l'ouverture de la procédure ;
‐ ne pas répondre, ce qui est également courant. L’absence de réponse dans les 30 jours équivaut à un rejet ;
‐ rejeter la demande, ce qu’il fait dans un grand nombre de cas. Il avance un motif tel que : la clause n’a pas été prévue ou n’a pas été acceptée, ou bien les produits ont été incorporés ou transformés – bref que l’une ou plusieurs des conditions requises ne sont pas remplies. Il reste alors à s’adresser au juge commissaire.
En tout état de cause, on doit également déclarer sa créance.
Deuxième démarche, en cas de rejet : le juge commissaire
Il faut alors adresser une demande au Juge-commissaire – c’est celui qui, au Tribunal de commerce, est chargé de la surveillance de la procédure.
S’il refuse, il ne reste alors qu’à faire appel de cette décision, qui évidemment rend la démarche plus longue et coûteuse.
Un produit transformé peut-il être revendiqué ?
Non, puisque la loi exige que la marchandise se retrouve «en état ».
Un produit incorporé peut-il être revendiqué ?
« Oui mais » : la loi permet de récupérer un produit incorporé à deux conditions :
‐ La séparation peut être faite sans dommage pour ce produit (exemple : composant)
‐ La séparation peut être faite sans dommage pour le produit dans lequel il est incorporé (exemple : équipement sur lequel le composant est monté).
Ces conditions sont mentionnées à l’article L624-16 du Code de commerce, ci-après reproduit.
Le produit déjà revendu par le client peut-il être revendiqué s’il a été?
Non, c’est impossible (en droit français), mais le client peut faire opposition au paiement du prix, en agissant auprès du client du client, afin de se faire payer à due concurrence.
Clause type proposée – Clause de base, la plus simple possible :
"Le fournisseur conserve la propriété des biens jusqu'au paiement effectif de l'intégralité du prix en principal et accessoires. Le défaut de paiement de l'une quelconque des échéances pourra entraîner la revendication de ces biens."
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